« Mon âme a besoin de largeur et de hauteur. Et pourtant je mène une vie mesquine, à courir après les roubles et les kopecks. Il n'y a rien de plus minable que la vie bourgeoise avec ses petites pièces de monnaie, ses conversations absurdes et ses vertus inutiles et conventionnelles. Mon âme s'est flétrie parce que je travaille pour de l'argent et que l'argent est au centre de mes activités. Cette sensation insupportable et un zeste de bon sens me font considérer mon métier d'écrivain avec mépris : je n'ai aucune estime pour ce que j'écris, et ce que j'écris me révulse et m'ennuie. » Petit-fils de serf et fils d'un boutiquier en faillite, Anton Tchekhov (1860-1904) commence à écrire pour gagner de quoi finir ses études de médecine, et continue à le faire parce que ses « balivernes » lui rapportent plus que ses malades. Persuadé qu'il n'a rien à dire, il se tourne vers le théâtre, et laisse à ses personnages la charge d'assumer des propos qui ne sont pas les siens. Quand sa bonne étoile lui assure enfin des revenus suffisants et un succès qu'il croit immérité, Tchekhov, déjà très malade à moins de quarante ans, arrête presque d'écrire, persuadé qu'après sa mort tout le monde l'aura oublié. Ce livre est le récit de la vie, banale et fabuleuse, d'un homme qui haïssait le mensonge et la violence, leur préférant l'amour et la liberté la plus absolue.
Escritas "con prisas" y "probablemente malogradas", así lo dice él mismo, las novelas de Fiódor Mijáilovich Dostoievski (1821-1881) lo convirtieron en uno de los autores más importantes de la historia de la literatura. Su biografía podría pasar por una de sus novelas: tuvo una infancia difícil, participó en movimientos progresistas rusos, fue condenado a trabajos forzados, vagó por toda Europa, padeció epilepsia, alcoholismo, adicción al juego... Hasta ese punto el protagonista, contradictorio y de actos sorprendentes, está atrapado en un torbellino de historias tan inverosímiles que parecen inventadas. No lo son. Lo someten a unas pruebas terribles que, para sobrevivir, lo obligan a sumergirse en esos rincones normalmente ocultos de la personalidad donde se alojan los mecanismos de nuestras conductas. Conduciéndonos hasta allí, Dostoievski nos descubre a sus personajes. No debe sorprender que estos se le parezcan, tan profundamente asombrosos cuando rozan el misterio de la existencia, tan ordinarios en la vida cotidiana, en la que son, al igual que él, un ser como cualquiera de nosotros.